Après le test, il y a une phase de compte-rendu, de discussions avec la psychologue. Elle m’a expliqué point à point les résultats, catégorie par catégorie. M’a fourni un compte-rendu numérique – aujourd’hui bien rangé dans la catégorie “Santé / Ordonnances et Comptes-rendus” de mon Drive. C’est moi, c’est mon cerveau, c’est de la psychologie, est-ce de la santé ? Cela s’appelle bien compte-rendu d’examen psychologique !

Compréhension verbale, raisonnement perceptif, mémoire de travail, vitesse de traitement.

QIT. 

Homogénéité, hétérogénéité des résultats. 

Quinze épreuves, tests, examens, qui donnent des intervalles pour quatre catégories. 

Moi qu’on a toujours définie comme ayant une bonne mémoire, comme une crack des chiffres – le mot autisme a été prononcé plusieurs fois, et pas par des psys, ou pas seulement -, mon test le plus faible est la mémoire des chiffres. 

Intéressant. 

Et si c’était le début d’une réévaluation de moi-même ?

La psy me conseille un livre. Je regarde aujourd’hui mon historique de commandes pour en retrouver le titre. 15 novembre 2021 : je l’ai commandé le jour même des résultats. Trop intelligent pour être heureux ? : L’adulte surdoué, de Jeanne Siaud-Facchin.

J’attends la livraison en en lisant les avis sur Internet. Plein de “ça a changé ma vie”, “enfin je me suis senti compris”, “j’ai pleuré tout du long”. 

J’avais envie de pleurer, et pas de tristesse ou de colère, mais je suis restée assez hermétique. Je ne me sentais pas concernée. Oh, bien sûr, le livre indiquait que la première réaction était souvent le déni, surtout chez les femmes. Moi ?? Impossible, je ne suis pas intelligente !

Je ne pensais pas ça. Aussi prétentieux ou délirant que ça puisse paraître, je ne m’attendais pas à ce que mon QI m’assène que j’étais “une personne normale”. Je ne me pensais pas “une personne normale”. Ni stupide, pas sur les plans mesurés par les tests – pour le reste, l’intelligence émotionnelle, la capacité à vivre heureuse et à s’adapter, on verrait plus tard. 

Je n’étais pas sûre de passer la barre des 130, de pouvoir officiellement faire partie du club, j’avais peur que le penser soit de la suffisance, j’avais peur d’être déçue. De m’être trompée. 

Mais ce que disait le livre, non, je ne m’étais jamais cru stupide, ou pas longtemps. 

Le livre m’a peu marqué, je m’en souviens peu, je me rappelle seulement ma déception, ma frustration, à ne pas me retrouver dans le texte, pas assez, à le trouver généraliste voire franchement caricatural.

Et la honte, encore. 

Non, je n’étais pas surdouée, car je n’étais pas assez modeste pour penser ne pas l’être.

Non, je n’étais pas surdouée, car je n’étais pas persuadée d’avoir cette empathie immense, cette hypersensibilité profonde. Car je n’étais pas sûre que j’aurais été Résistante, car je n’avais pas sacrifié ma vie à une cause juste et louable, car la vie a pour moi bien plus de nuances et que le Bien et le Mal, avec majuscules, n’existent pas. 

Non, je n’étais pas surdouée, car je ne me sentais pas immédiatement à ma place, à la maison dans ces mots. 

Non, je n’étais pas surdouée, il y avait encore trop de “oui, mais” et de “ça ne s’applique pas à moi” dans ma lecture. 

Allait-il encore falloir que je trouve par moi-même ce que je pouvais être ?