– une première rencontre (1h)
– la partie anamnésique : développement, relation, comportement (1h30)
– la partie comportementale : interaction (1h)
– la partie sensorielle (questionnaires)
– le fonctionnement émotionnel : accès à l’imagination, partage de la pensée (1h30)
– une restitution (1h)
Ça, c’est la théorie.
7 août 2023, je viens de finir la seule semaine de vacances que j’ai pu prendre cet été. Je rentre d’un mariage. Mon rendez-vous est fixé à 13h, j’ai 45 minutes de route pour y aller. Je prévois de partir vers 11h, 11h30 pour avoir de la marge. Rien ne se passe comme prévu.
Il y a un accident sur l’autoroute. Mon GPS me fait sortir et emprunter des petites routes de villages, je déteste ça. Au fur et à mesure que j’avance, l’heure d’arrivée recule. Bientôt, je n’ai plus que 30 minutes de marge, alors que je pensais avoir amplement le temps de trouver à me garer, et m’acheter à grignoter dans la supérette repérée à 100 mètres du cabinet.
J’arrive vers le cabinet, repéré sur Google Maps, mais la rue n’est pas photographiée, et la secrétaire, dépendant d’un autre cabinet, était incapable de me dire s’il y avait un parking. C’est une grande ville : j’avais essayé de faire un peu de repérage, et avait conclu qu’il existait des places payantes dans la rue. Facile, si on a assez d’avance. Je dépasse donc l’impasse, et la rue suivante présente des places payantes. Problème : elles sont limitées à 2h, et l’horodateur ne prend que les pièces, que je n’ai pas (dans ma ville, ils prennent tous la carte).
Il est 12h40. La situation commence à me stresser. Je demande à mon GPS un parking, quel que soit le prix du stationnement. Il y en a un pas loin. Quand je passe devant, c’est en travaux, et il n’y a pas de parking. Un autre, même schéma. Je m’éloigne du point de rendez-vous. Je ne sais pas où me garer. Il est 12h50, et je suis suffisamment loin pour ne pas avoir le temps de marcher jusqu’au cabinet. Je panique, je ne réfléchis plus (on ne le dit pas assez, mais on devient vraiment stupide quand on panique). Je m’arrête dans la première place venue – pensez sur le trottoir, ou dans une place privée, je ne sais plus.

12h57. Situation désespérée.
Je reçois un mail de l’examinatrice : elle est aux urgences à l’hôpital, il faut repousser la séance. Je suis à la fois soulagée et submergée. J’ai rendez-vous après le rendez-vous avec une amie qui habite cette ville : je l’oublie un instant, démarre la voiture en trombe, prend le chemin du retour en pleurant. Je pleure pendant des kilomètres et des kilomètres, comme si toute ma vie était remise en question par ce contre-temps. Malgré un côté rationnel qui me dit que c’est la vie, ça arrive, ça va se refaire. Je suis dévastée. Je ne pourrais pas prendre d’autre jour de congé. Je n’aurai jamais le courage de revenir. Je ne fais plus confiance, je ne veux plus voir l’examinatrice. Il me faut 40 kilomètres, dans le brouillard des larmes, pour me calmer un peu. Je rentre, je vais dans ma chambre, j’ai besoin de redescendre. Toutes mes vacances, j’ai attendu ce rendez-vous, la clôture symbolique de cette semaine, sans laquelle je n’envisageais pas de retourner au bureau. Au moins, ce sera fait.
Ce n’est pas fait.
Je voudrais trouver un autre examinateur, mais il n’y en a pas. J’ai attendu trois ou quatre mois ce rendez-vous, je ne peux pas recommencer à zéro.
Elle s’excuse, dans son mail, et m’informe qu’elle m’appellera le lendemain matin. Su-per, un appel, il ne manquait plus que ça. Je lui dit entre midi et deux. J’attends le lendemain, assise dehors, seule. À 13h15, sans nouvelles, j’envoie un message court, pause déjeuner finie, réglons ça par mail. Je ne prendrai pas de jour supplémentaire, faisons cette première rencontre par visio.
Elle est d’accord.
Elle communique de façon directe, peu enluminée, je ne suis pas sûre qu’elle aime le téléphone plus que moi. On s’accorde pour se voir dix jours plus tard, en visio. Entre temps, je dois remplir des questionnaires et lui envoyer.
La première approche se fait donc sur Skype. Je me présente, raconte mon enfance, répond à ses questions. Elle m’explique le processus. La journée que je passerai dans son cabinet. Elle me dit où me garer, ironiquement, dans l’impasse dans laquelle je n’étais pas entrée, il y a des places gratuites.
Notre interaction me rassure. Et je suis chez moi, avec mon Coca zéro, mon siège en velours bleu, mes cadres pour décor.

Je dois la revoir trois jours plus tard. Dans l’intervalle, j‘ai trois tests à remplir, format PDF. Du type « jamais – parfois – souvent – toujours » ou « pas du tout d’accord – pas d’accord – neutre – d’accord – tout à fait d’accord ». Du type, dans tous les cas, à nous faire nous poser des questions étranges, à remettre chaque question en cause, à penser que rien n’a de sens, présenté ainsi.
Le jour arrive. Je trouve la place sans problèmes. Il n’y a pas d’accident. J’arrive confortablement en avance. Je vais acheter une gaufre à la supérette, un Pepsi Max – je les préfère au Coca, mais j’apprécie les deux. La gaufre n’est pas très bonne, mais elle me remplit le ventre de façon neutre, sans âme, sans trop de graisse que mon estomac refuserait. Je suis assez en avance pour repérer le bâtiment. La sonnette. Calculer quand appuyer : cinq minutes avant ? Trois ?
Ce fut huit. La porte bipe, je peux l’ouvrir. La plaque indique rez-de-chaussée, c’est en effet juste là. Un panonceau indique d’entrer sans sonner et d’attendre. La salle d’attente partagée est vide, j’ai le temps d’aller aux toilettes. D’observer le tipi pour enfants, les étagères. Il y a un canapé, je choisis la chaise moins confortable. J’attends. Au moins, je suis à l’heure et au bon endroit.
Je me souviens vaguement des tests en eux-mêmes, plus de mon sentiment d’être un peu perdue, de ne pas trop savoir ce qu’on attend de moi, et pourquoi le test est pertinent. J’essaie de ne pas amplifier mes symptômes, de ne pas les cacher. Au fur et à mesure, je me détends, nous échangeons quelques blagues. Je l’informe de ma perplexité face à plusieurs exercices – cela fait partie, aussi, du diagnostic. J’imagine qu’il ne serait pas bon de tout décrire, encore moins d’expliquer quel comportement oriente vers quel résultat. La perplexité fait aussi partie du diagnostic, je suppose.
Les tests sont étranges, saugrenus, visent à faire ressortir, finalement, la perplexité des autistes face aux interactions. J’ai lu que certains les trouvent puérils, voire humiliants. Beaucoup sont perplexes, sceptiques.
Et puis l’examinateur explique les comportements, ce qu’il a noté.
Août 2023, mon test est fini. Je sors du cabinet avec l’impression de n’avoir rien vraiment dit, de n’avoir rien abordé. Je n’ai pas parlé des crises, des spécifités, pas donné tous les exemples que j’avais écrits dans un cahier. Il paraît qu’elle a ce qu’il faut.

Et maintenant, on attend…
Pour les résultats et réactions associées : C’est officiel ; attente des résultats
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