
Pour lire la mauvaise expérience que j’avais faite en 2013, c’est ici.
2023.
Environ dix ans après ma première expérience, traumatique, avec l’hypnothérapie.
J’ai changé. Je suis en changement.
J’ai été identifiée HPI. Il y a des doutes sur Asperger.
J’ai ouvert un blog sur la psychologie et les neuroatypies. Je me renseigne beaucoup, depuis les résultats de mon test, et au-delà du HPI aussi. Je décide de candidater à une licence de psychologie. De me prendre en main. De changer de boulot, comme un électrochoc, comme le dernier boulot avant de faire autre chose, avant de devenir quelqu’un qui pourrait se sentir utile.
Après quatre psys, un psychiatre, une magnétiseuse et une praticienne neuro-feedback, j’en arrive à voir une coach, découverte sur Youtube, qui se spécialise dans les femmes HPI. Quitte à faire.
Elle fait aussi de l’hypnothérapie. Je lui raconte ma première expérience.
Elle en reparle quand même. Je suis prête à réessayer.
L’hypnose est une chose étrange. Je passe le début de la séance à lutter, persuader que ça ne va pas marcher, et il n’y a d’ailleurs pas grand-chose qui doit marcher. Pas de manipulation mentale, pas de suggestion d’action. Simplement visiter sa tête, son histoire. L’idée, cette fois, est de s’imaginer dans un véhicule naviguant le temps, et de retourner à un instant problématique ou quintessentiel, celui que notre cerveau voudra bien nous proposer.
Mon véhicule est un bateau. Une petite barque en bois, naviguant sur un fleuve immense. Comme lors de mon voyage en Egypte, les berges sont jaunes, sableuses.

On doit s’imaginer, fixant sa main qui se rapproche doucement, et la main ne se rapproche pas. Je la rapproche moi-même, on ne va pas y passer la nuit, tiens mais elle était déjà là ?
La main touche. J’ai chaud. J’ai peur. Je me sens ridicule. Je ne sais pas quoi faire.
L’instinct ? Le lâcher-prise ? Ne me parlez pas de ce que j’ignore.
Je ne remonte pas le temps. J’ai peur de me laisser aller. Au moment où, à la fin du décompte, je dois être dans mon souvenir, je panique.
« Trois ». Je n’ai rien en tête.
« Deux ». Et si quelque chose venait ? C’est placebo ce truc, ça ne fonctionne que si j’ai la foi.
« Un ». Et si rien ne venait ? Comment se poursuivrait la séance ? Que dire, que faire ?
« Zéro ». Ou « Maintenant » ? Quel mot a-t-elle bien pu prononcer ?
Il y a quelque chose. Ce n’est pas un souvenir.
C’est une caverne.
C’est ma solitude.
J’ai froid, maintenant.

Je voudrais désespérément que cela change tout. Trouver des réponses. Je me mets une pression pour trouver des réponses, pour être révélée, illuminée à moi-même. Pour avoir une voie, une logique, sans avoir à la créer pour moi, consciemment.
Je suis enfant, je crois, même si ce n’est pas un souvenir. Je suis dans la caverne, au bord d’une étendue d’eau. L’atmosphère est humide, mais étrangement agréable, je crois qu’il y a un feu de camp.
Je ne me souviens guère de la suite. Je ne raconte pas. J’ai très froid, je crois que je panique. Et le mot sort, étranglé, comme source de mon problème, à cet instant de mon voyage :
Solitude.
Solitude incommunicable. Ontologique. Pas forcément permanente, mais ressentie ardemment parfois.
Et l’objectif, la foi, la direction du voyage : établir le lien. Comme j’aimerais cesser de croire que l’autre est parfaitement inaccessible ! Je le crois moins, déjà.
Je suis entourée, pourtant. Ma famille, mon conjoint, mes amis, le cercle est resserré, et sincère.
Pourtant parfois, au bord de l’eau, dans la caverne froide, la solitude est immense.
Je suis au fond d’un puits.
Je m’endors en pleurant.
Je me réveille en haut.
Une soirée, un brouhaha, une mauvaise journée.
Je retombe.
Une réflexion, un livre, un film.
Je retombe.
Je remonte.
Quand je suis en bas, avoir été en haut n’a aucun sens. N’est pas assez. La caverne annihile les expériences de la lumière. Je ne me souviens plus que des instants où, l’autre étant là, je me suis sentie seule.
2023.
J’ai retesté l’hypnothérapie.
Je ne dirais pas que ça a tout changé, tout révolutionné, tout solutionné.
Mais je continue le chemin.
J’étais horriblement seule, dans ma rêverie, mais l’autre était présent. J’ai changé. L’hypnothérapeute était meilleure, ou plus adaptée à moi.
Le voyage continue.
La caverne sera toujours là. La marguerite.
Deux facettes d’une même médaille et d’une même expérience.
J’en retire que mes émotions changent la température des pièces.
Que l’autre peut être bienveillant.
Que l’esprit est complexe, et fascinant.
Que le voyage continue, en barque, dans la caverne, dans la fleur, de place en place. Je voyage en successions d’immobilités, d’endroits figés. De températures distinctes.
La fleur peut pousser dans la caverne, la barque m’y amener et m’en retirer.
J’ai un sourire sur les lèvres. Les yeux fermés, la chaleur de l’obscurité et de la vastité de l’idée du chemin.
Je suis toujours ambivalente vis-à-vis de l’hypnothérapie, une méfiance instinctive, un doute rationnel. Mais je remercie cette nouvelle hypnothérapeute, dont les discussions sur le voyage m’ont accompagnées au cours de cette écriture plus poétique que d’habitude.

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