Cet été, je suis allée à un festival de musique. Ce n’était pas vraiment mon idée : mon copain est musicien dans l’âme, il a joué dans un groupe, fait des concerts, écoute de la musique, s’y exprime et y trouve intérêt et plaisir.

Moi… moins. Mon esprit ne comprend pas la musique. Je peux être touchée émotionnellement – et c’est assez rare -, ou avoir l’impression de juste entendre du bruit, et finir avec un mal de tête – c’est plus courant. Je reconnais mal la justesse (ah ! Se souvenir des moment « casseroles » de la Nouvelle Star, et ne pas vraiment comprendre pourquoi ma famille se marrait, sauf dans les cas extrêmes), je suis incapable d’intellectualiser les choses : parfois, j’ai la chair de poule, c’est beau. Parfois, j’ai envie de me crever les tympans : ce n’est pas beau. Je suis incapable de quantifier, comprendre, identifier les notes, je confonds les différents instruments (au collège il fallait les identifier et je ne comprenais pas : personne ne nous avait appris à le faire. Il fallait savoir, sans avoir de cours…). J’ai un sens du rythme plus que douteux. Une capacité d’auto-réflexion plus que douteuse : on m’a souvent dit que je chantais faux, enfant (j’ai donc arrêté d’ouvrir la bouche), mais parfois aussi que je chantais juste ou joliment, sur des passages. Moi, je ne fais pas trop la différence. Des fois, j’aime ce que je chante, d’autres pas, c’est tout. À neuf ans, je passais des récrés à chantonner en tournant autour d’un marronnier, sur des paroles improvisées (mais je suis normale, hein, pas de souci à se faire !). Je suis souvent frustrée parce que j’ai un bout de chanson dans ma tête, un tout petit bout, et que je n’ai pas la suite, pas le rythme, et, si j’essaie de le chantonner pour qu’on me dise ce que c’est, ce qui sort de ma bouche n’a absolument rien à voir avec la phrase qui tourne en boucle. Mon petit frère est bien plus jeune que moi : on m’a dit à huit ou neuf ans que je massacrais même les berceuses, que Petit Papa Noël n’était pas reconnaissable. Je m’attache surtout aux mots, aux paroles, aux histoires. J’écoute donc peu de musique, et principalement en français. Je n’ai pas une super mémoire des paroles.
Tout ça pour dire que la musique et moi, c’est compliqué. Que le bruit, la foule, l’ambiance d’un festival, a priori, ça me fait peur. Mais qu’est-ce qu’on fait quand on a peur ? On fait le truc, bien sûr (appliquez à votre vie à vos risques et périls) ! J’ai fait un festival.
Ce n’était pas si terrible. On avait pris des billets qui nous donnaient droit à une zone VIP, au cas où j’aurais besoin de m’isoler un peu (et avec des toilettes séparées, avec un peu de chance, plus propres…). Je ne savais pas à quoi m’attendre, mais c’est allé. Il y avait cinq scènes, donc il était possible de s’éloigner et de parler assez facilement. Cela a duré de 14h à 22h30, et c’est passé vite. On pouvait s’asseoir à presque tous les concerts, et les autres étaient probablement les plus difficiles : j’ai du mal à rester debout, immobile, longtemps. Assise, je peux dissocier, oublier, parler, ignorer, profiter parfois. Je serais incapable de me souvenir de ce que j’ai écouté : quelques noms d’artistes, mais pas la moindre note, dans ma tête. C’est fréquent, pour moi, surtout que rien n’était en français, et autant je parle anglais couramment, autant j’ai beaucoup de mal, quand les gens chantent, à comprendre ce qu’ils disent. Comme à beaucoup de spectacles, j’ai parfois eu l’impression d’être hors de mon corps, d’observer le monde plus que de profiter de l’art, de l’expérience émotionnelle qui se déroule. J’observais les chanteurs, une chanteuse en particulier, son énergie, ses sourires, comme elle se perdait dans sa musique, s’y exprimait, comme j’imagine que je m’exprime dans mes romans. Moi, c’est seule, dans le silence des mots qui résonnent, eux, c’est dans la frénésie du spectacle – je ne partage pas, mais je crois que je comprends.

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