Pas envie d’écrire (passion et devoir chez les autistes)

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J’ai un article à écrire pour lundi – publier tous les lundis, à 18h, je me l’étais imposé. Nous sommes mercredi, mais jeudi est férié et j’ai pris vendredi. Je pars pour le week-end : hors de ma routine, je ne trouverai pas le temps d’écrire.

Alors je me dis, ok, pour une fois, pas d’article. Et puis, plein de questions. Pourquoi est-ce que j’écris, d’habitude, pour chaque lundi ? Quelle conséquence si je n’écris pas ? Dans un sens, j’ai l’impression que ne pas publier une fois, ce serait ne plus jamais avoir l’envie, l’enthousiasme d’écrire. Plus de justification pour le faire : si je sèche une fois, je ne le ferai plus jamais. C’est aussi la peur que j’avais à l’école : si je m’autorise un jour à considérer que je peux sécher les cours, pourquoi revenir demain ? Malgré toutes mes contradictions et mon besoin maladif de nuance, je me considère encore comme quelqu’un d’assez extrême, mes idéaux le sont, du moins. J’imagine toujours en noir ou en blanc : je continue toujours, je m’arrête pour toujours, je fuis, je disparais, j’envoie tout bouler, je reste identique à jamais. Pourtant, je vis en nuances de gris : je concilie le travail et les études, les projets d’avenir et le présent, les petites contradictions avec le quotidien. Je résous les difficultés au lieu de les fuir, souvent.

Je n’ai pas envie d’écrire alors j’en fais un article. Je ne me sens même pas vraiment engagée envers ceux qui me lisent – ils sont importants, pourtant. Leurs retours, l’idée de pouvoir aider, les discussions, surtout. Et les discussions avec moi-même. Je progresse, je réfléchis, je change en écrivant. Et qu’est-ce que j’ai la flemme, parfois. Je n’écris pas – plus, je crois – par passion, par besoin irrépressible d’écrire. J’ai envie d’avoir écrit, voilà tout. Hâte d’être cette prochaine version de moi-même. D’être soulagée d’avoir rayé cette ligne de ma to-do list. Voilà, c’est dit, je suis autiste et je fais des choses sans passion : ça me donne l’impression d’être illégitime. Je lis tant sur Instagram à propos de la passion, des intérêts spécifiques, du drive autistique. Moi, j’ai l’impression d’écrire par devoir, souvent, par engagement envers moi-même. Et, souvent, j’ai la flemme.

Pourtant, à d’autres moments, des sujets me viennent, enthousiastes. Il faut les saisir au vol. Accepter que la fascination d’un jour est la morosité, le devoir du lendemain.

Dites-moi que je ne suis pas la seule, à m’enthousiasmer puis ne plus vouloir, à agir froidement, par devoir, à me sentir tiède dans mes ambitions, au lieu de passionnée !

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