J’ai commencé un nouveau travail. Qui a plus de sens. J’étais dans une banque, je suis désormais dans l’instruction publique (à chaque fois dans l’informatique).
Je ne peux plus en vouloir à mon travail de n’avoir aucun sens. J’ai, de plus, une forme de gratitude envers ceux qui m’ont embauchée, qui se transforme souvent, chez moi, en culpabilité, en injonction à performer et à être ce qu’on attend de moi. Attendent-ils que je sois une employée parfaite, ou l’employée handicapée qu’ils savent que je suis ? Dans ma tête, bien sûr, il faut être parfaite. D’humeur et de concentration égales, il faut cacher mes difficultés et m’adapter. Je ne le fais même pas exprès. C’est comme si quelqu’un d’autre prenait ma place, s’adaptait de force, se fatiguait à le faire.
C’est intéressant. Je suis fatiguée. Physiquement et psychiquement. J’ai eu la formidable idée d’aller au bureau à vélo : quatrième semaine, j’y vais en bus. Mes chevilles et mes poignets tirent, mes cuisses brûlent, et je me sens faible, tout le temps. Presque tout le temps. Parfois je fonctionne, « sous adrénaline ». Parfois je fonctionne, j’oublie que je vais mal, ou je ne vais plus mal. C’est difficile de savoir. Je me dis que mon mépris pour mon travail, mon sentiment d’absurdité avait bon dos. Bien sûr, trouver un travail que je ne me sens pas le droit de trouver absurde, ne résout pas tout. C’est mieux, je crois, mais la transition est énergivore. Je rêve de sommeil. Je rêve de projets, d’allant, d’énergie.
Je rêve de routine, moi que la routine rend folle, je rêve de temps libre, et pas seulement de vautrage comateux sur le canapé.
Les cours me stressent un peu, aussi. Le rythme a augmenté, j’ai choisi une matière supplémentaire, les messages s’enchaînent sur les conversations Whatsapp, soulignant l’immense masse de données à apprendre. Ma mémoire n’est plus ce qu’elle était.
J’ai commencé un nouveau travail. C’est une bonne chose. C’est fatigant. J’ai un peu peur de ne plus jamais avoir les ressources de jadis, l’adaptation facile, soutenue par l’absurdité et le sentiment qu’il n’y a pas de choix, pas de plan B. Je pouvais m’adapter : je n’envisageais pas qu’une autre option était possible. Je m’étiolais, j’étais triste : je pensais que c’était ça, la vie.
Aujourd’hui j’ai de l’espoir, l’espoir de vivre bien, heureuse, un jour. Ça n’aide pas le quotidien, la transition, les gens nouveaux, les déplacements, la concentration. Le boulot n’est pas absurde, mais comme j’aimerais dormir, comme j’aimerais pourrir un peu, quelques journées entières, sur le canapé, devant des divertissements simples, pour retrouver un peu d’énergie de vie !

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