C’est rassurant d’avoir son diagnostic. On est pas fou, on a accès à une forme de normalité dans ce nouveau groupe qu’est l’autisme, ou la neurodivergence en général. On croise plein de gens, sur Instagram, sur des blogs.
On fait partie d’un groupe – ou pas. Souvent, je m’identifie à un certain nombre de traits, mais je complexe parce que je n’ai pas « assez » de traits, parce que je m’en sors – à peu près – dans le monde neurotypique, parce que je n’ai jamais coupé systématiquement une étiquette de vêtement ou que je déteste les petites lampes d’ambiance.
J’ai été diagnostiquée alors que j’avais commencé un nouveau boulot quelques mois plus tôt. J’ai eu du mal à m’intégrer. J’ai souvent besoin d’une personne très sociable, d’un point d’entrée dans un groupe. Dans ce poste-là, j’ai eu du mal. Ce n’était pas la première fois, mais ce n’est pas si fréquent. Dans ce poste-là, mon chef m’a fait plein de remarques stéréotypiques, que je n’avais jamais reçues auparavant : je n’étais pas assez sociable, je devais « réseauter » plus, me lever et aller parler aux gens sans sommation, « décrocher mon téléphone » au lieu d’envoyer des messages écrits. Il m’a dit que des gens lui faisaient des remarques disant que j’étais trop timide, sauf aux apéros – j’adore écouter les histoires des gens. Je collectionne les histoires, les anecdotes.
Je n’ai plus trop confiance en moi. Avant, je pensais être capable de tout faire, même si ça ne me faisait pas plaisir. Je savais me forcer. Je savais devenir indifférente pour tout supporter. Devenir de pierre pour aller à un entretien d’embauche. Compter sur l’adrénaline, sur le masque, sur l’injonction à performer pour réussir l’entretien. J’étais détachée mais efficace.
Je ne sais pas dans quelle mesure j’ai perdu confiance à cause du diagnostic, à cause du travail, grâce à la thérapie qui me permet de me rapprocher de mes émotions, à cause d’une forme de burnout où les choses ne sont plus si faciles.
Peut-être que le diagnostic et la thérapie m’ont juste ouverte à un monde où l’éventualité de mon échec, de ma faiblesse, du fait de ne pas aimer certaines choses, est acceptable, ou juste possible. Peut-être que le fait d’avoir repris des études et d’avoir un plan à (très) long-terme me fait me sentir moins coincée, moins obligée de performer, de continuer à tout prix.
Peut-être que je sens mieux mes limites, et mes émotions.
Peut-être que je suis devenue faible, avec ce diagnostic.
Peut-être que mon travail actuel était le travail de trop, ou était trop inadapté.
Peut-être que le fait d’avoir partagé mes livres et mes pensées, sur ce blog, m’a donné le courage d’être un tout petit plus moi-même, d’accepter un tout petit peu moins de m’efforcer d’être autre chose.
Peut-être que j’ai renoncé à l’histoire que je me racontais sur moi-même, que je l’ai transformée.
Probablement tout ça à la fois.
Je me sens renforcée et fragilisée. Proche d’un tournant. J’ai peur et j’ai hâte.
Bientôt, je pourrai être plus honnête, j’espère, dans le cadre de mon travail.
Plusieurs années plus tard, je pourrai faire autre chose.
Et je changerai.

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