Autisme « de haut niveau » / à « haut niveau de fonctionnement »

Lorsque j’ai obtenu mon rapport de tests psychologiques visant à dépister un autisme, la psychologue concluait :

« le fonctionnement de Noémie se situe sur le spectre de l’autisme de haut-niveau« .

Mais quand j’ai commencé à me renseigner un peu plus, il y avait un spectre de l’autisme, des niveaux de support, mais « autisme de haut-niveau », ce n’est pas vraiment utilisé, ou en tout cas pas dans le DSM-5, le manuel des troubles mentaux américain. Comme le terme « syndrome d’Asperger », l’autisme de haut-niveau, ou, traduit de l’anglais high-fonctioning, l’autisme « à haut niveau de fonctionnement », c’est une façon de décrire ceux qui sont autistes, qui ont des scores significatifs aux tests et dont le fonctionnement et la vie quotidienne sont significativement impactés par l’autisme, mais pour qui ce n’est pas forcément immédiatement visible. Qui n’ont pas de déficience intellectuelle. Ceux qui savent camoufler leurs difficultés, qui ont mené une vie à peu près normale, sont allés à l’école de façon à peu près normale, qui souvent n’ont rien su de leur autisme avant l’âge adulte (même si on peut être « de haut niveau » et le savoir depuis l’enfance). Dont les difficultés et souffrances énormes peuvent être cachées.

À l’époque où Asperger était encore un diagnostic présent dans les manuels (avant 2013 pour le DSM, avant 2018 pour la CIM), on différenciait Asperger et autisme à haut niveau de fonctionnement (AHN) par le fait que les AHN présentaient un retard de langage, contrairement à ceux diagnostiqués du syndrome d’Asperger.

Aujourd’hui, c’est une bonne soupe pas claire. On a les niveaux de support : niveau 1, la personne nécessite un soutien, niveau 2, elle nécessite un soutien important, niveau 3, soutien très important. Ça, c’est dans le DSM-5, ça peut être diagnostiqué par un professionnel de la santé.

Et on a les dénominations comme Asperger et haut-niveau, encore utilisées par plein de professionnels, sans véritable définition qui fait consensus.

D’après les définitions du DSM précédent, ayant parlé tôt, j’ai plus un profit Asperger que haut-niveau (même si le DSM ne mentionnait que Asperger, pas le haut niveau). J’ai, certes, un TDAH qui me rend moins rigide et un QI qui augmente ma vitesse de processing.

Bref, je suis autiste.

Je suis indépendante, voire j’évite les gens et les situations inconfortables. J’ai des relations « normales » (avec des gens un peu moins normaux, eux, et c’est pour ça que ça marche). J’ai un travail (hélas !), un compte en banque, des responsabilités comme un chat ou un crédit.

Je suis autiste. Et ça ne se voit pas, sauf quand on est dans mon intimité, quand j’ai mon casque sur les oreilles parce la cocotte-minute est trop bruyante, que je fais une crise dans la voiture en rentrant du travail, que je ne parle plus au milieu d’une soirée. Quand je crie, quand je m’énerve, quand je me cache parce que soudain, je suis nulle et le monde est insupportable. Ça ne se voit pas, au travail, sauf si on m’écoute pleurer derrière la porte des toilettes, sauf quand on me dit que je dois « sortir de ma zone de confort » et faire « du réseautage » et parler plus et être moins directe et ne pas laisser les autres parler à ma place. Ça ne se voit pas, sauf quand j’ose enfin partager ce qu’il se passe à l’intérieur de ma tête, sauf quand j’écris, sauf quand je me dévoile.

Haut-niveau, peut-être, mais autiste. Avec besoin de moins de support, ou pas le même, mais avec des difficultés réelles.

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